Nous vous parlions précédemment du cycle de conférence « les tours en débat » se tenant à Lyon, et, séduits par la proximité de l’évènement, nous avons décidé d’y aller entre rédacteurs d’urbanews. Tout aurait pu bien se dérouler si nos agendas avaient étés à jour… une demi heure de manquée (ainsi que nos places) plus tard, l’organisation de l’évènement ayant été excellente, nous avons tout de même pu assister à celui-ci dans une pièce annexe, sur écran géant, debout, quelle aventure !
Aujourd’hui, c’était Roland Castro, entre autre architecte au projet Grand Paris qui nous a fait l’honneur de sa présence. D’humeurs personnelles aux débats de fond, il a su apporter aux futures conférences des bases de réflexion intéressantes.
Un constat, l’échec du modernisme
N’importe qui peut faire le constat de l’échec de l’époque moderniste et des grands ensembles. Mais les points où Roland Castro se veut le plus insistant ne sont pas forcément ceux auxquels on pense le plus souvent.
Loin de conspuer le principe des tours en elle-même, bien qu’il en dénonce la mauvaise conception et leur but de « stockage », c’est dans les principes modernistes qu’il trouve ses arguments : le souci de la lumière, de la ligne de vue, de l’orientation et de l’espace ont conduit selon lui l’avènement d’espaces déconnectés de la réalité dans laquelle ils s’inscrivent, rarement dans l’axe du bâti existant, généralement placés sur le seul critère des points cardinaux. A côté de cela, la faible densité rend difficile la rencontre entre les individus, et l’espacement des immeuble efface le sentiment d’appartenir à un ensemble urbain. Comme il l’a de plus fait judicieusement remarquer : dans cette logique, il est souvent agréable de voir depuis l’intérieur, mais rarement de voir la construction depuis l’extérieur.
Débat en présence d’un architecte
Cette inscription dans l’espace, cette prépondérance de lignes, de formes, de ciel dans le débat, montrent bien qu’on a là affaire à un architecte. Loin d’être péjorative comme on peut souvent l’entendre, cette précision marque au contraire bien son souci d’un espace cohérent, pensé dans la durabilité, tout en étant technique et esthétique.
La tour en tant que telle n’est pas un mal selon lui; cette vision très française, cette tendance à la sacralisation de l’existant et au rejet de la hauteur, il la regrette, car contraignant toute tentative de faire émerger des projets innovants pouvant apporter à l’urbanité une densité nouvelle. Les condensateurs d’urbanité que sont pour lui les tours, doivent être réfléchies non pas en terme de « plus-haut », « plus-grand » ou « plus-technique » (débat qu’il juge caduque aujourd’hui), mais « plus-humaines ».
La tour humaine, l’espace public vertical
Ces tours plus humaines, Roland Castro les imagine combinées à l’espace public. Ses travaux personnels qui ponctuent et illustrent la conférence montrent différents essais d’espaces en gradins, sur des toits, bref, un espace public qui accompagne la tour dans son ascension, et qui ne laisse donc pas les gens sans sol.
Loin de « l’arrogance » des tours de verre réfléchissant pour « patrons aux lunettes fumées », il cherche à changer l’image des tours symbole de puissance, pour en faire des tours vivantes, habitées, dont l’apparence extérieure nous laisse apercevoir la qualité de vie qui y existe.
Loi, règlements, normes, une hiérarchie à respecter
Une grande part du débat a porté sur les tendances nouvelles de la construction, cherchant à répondre à des normes strictes et des attentes écologiques de plus en plus strictes, témoignant selon lui d’un danger de retour en arrière, qui dans les cas extrêmes, cherche à institutionnaliser des pratiques qui ont déjà largement prouvé leurs limites (installations selon l’orientation, étalement, espacement important des logements…).
Comme il le fait justement remarquer, la loi stipule que tout le monde doit avoir un toit, le règlement veut que l’on construise une urbanité agréable, il n’est pas logique qu’une norme remette en question les deux points précédents : préciser qu’une ville doit être agréable est selon lui suffisant, c’est au bon sens de faire le reste. L’apparition de grilles de facteurs de qualité signe le retour d’un manque de clairvoyance et d’originalité, nombre d’architectes se cachant selon lui derrière les normes de peur de trop prendre de risque. Des normes oui, des diktats non.
Prochaine conférence le 18 mars, en espérant ne pas nous tromper d’horaire cette fois, et vous donner plus que quelques infos « à chaud ». Encore merci au CAUE de Lyon pour ce cycle enrichissant que nous vous conseillons vivement de suivre avec attention !