Le 24 mai dernier, nous vous annoncions que l’Assemblée Nationale avait voté un projet de loi présenté par Cécile Duflot. Ce dernier contenait la possibilité de recourir à 8 ordonnances différentes pour relancer la production de logements. La première d’entre elle a été présentée et validée avant-hier par le Conseil des Ministres. Cette ordonnance vise spécifiquement à lutter contre les recours malveillants et à réduire le délai de traitement des contentieux.
La lutte contre les recours malveillants
D’après les arguments mis en avant par la note de présentation de l’ordonnance, 25 000 à 30 000 constructions de logements seraient impactées par des recours abusifs. Pour la seule ville de Marseille, 5000 cas seraient recensés chaque année (10 000 étant en cours), pour une production départementale de 6000 logements par an. Si l’étude d’impact du projet de loi n’évoquait aucun chiffre sur ces recours abusifs, leur existence est néanmoins bien connue des urbanistes et nombreux sont ceux qui racontent des anecdotes à base d’enveloppes qui passent sous la table.
Pour lutter contre ce phénomène, cette ordonnance vise à préciser l’intérêt à agir du requérant afin d’apprécier son recours. Ne pourront plus ainsi déposer de recours des individus dont la situation au moment de la publication de la demande de permis de construire n’indique pas qu’ils seront impactés par le projet. Actuellement, indiquer que l’on a l’intention de s’installer à l’avenir à proximité d’un projet suffit à pouvoir déposer un recours, quel que soit son lieu de résidence.
A l’avenir, il faudra habiter à proximité du projet ou avoir déjà entamé des démarches pour le faire. Ce type d’appréciation est déjà appliquée aux associations, qui doivent avoir des statuts préexistants à la demande du permis de construire pour pouvoir s’opposer à ce dernier. Si cela peut freiner les velléités d’opportunistes, on peut néanmoins se demander si cela peut bien être suffisant contre un réseau plus organisé qui aura probablement vent des intentions de construction suffisamment tôt pour mettre en place les parades nécessaires. Tout cela sera laissé à l’appréciation du juge administratif, dont les compétences vont être élargies.
Ce dernier pourra ainsi condamner l’auteur d’un recours jugé malveillant à des dommages et intérêts sans passer par une nouvelle procédure spécifique. En dehors des cas de chantage financier, les recours peuvent en effet avoir vocation à fragiliser un montage économique en le soumettant à un délai qui peut dépasser quatre ans.
L’ordonnance vise également à encadrer le système des transactions en cas de désistement du requérant. Ainsi, les transactions financières ou en nature délivrées au requérant en contrepartie de l’annulation de son recours devront être déclarées auprès de l’administration fiscale. Sous peine d’une obligation de restitution des sommes versées.
Il est enfin à préciser que les associations environnementales feront l’objet d’un régime spécial, par présomption que leur action vise par principe l’intérêt général.
Réduire les délais de traitement des contentieux
La note de présentation de l’ordonnance le rappelle, « les délais de traitement des contentieux d’urbanisme (même ceux qui sont déposés de bonne foi et de façon parfaitement légitime) sont pointés du doigt comme de véritables freins à la construction« . Aussi, le juge administratif (encore lui) pourra différer l’annulation d’un permis de construire s’il estime qu’un vice de procédure constaté est mineur et qu’il peut être régularisé par un permis modificatif. Actuellement, ce type de situation entraîne l’annulation pure et simple du permis et nécessite de relancer la procédure dans son ensemble.
Des recours seront néanmoins possible à l’encontre des permis modificatifs présentés afin de permettre aux requérants de s’opposer à ces derniers.
Deux autres mesures sont également annoncées par l’ordonnance, toutes deux visant également à réduire les délais de traitement des contentieux. Ces dernières seront de nature réglementaire et feront l’objet d’un décret d’ici la rentrée.
Cette ordonnance sera applicable à compter d’un mois après la publication de cette dernière au Journal Officiel.