Des arbres dans la ville
Les arguments scientifiques en faveur de la nature urbaine sont devenus de plus en plus nombreux au cours des dernières décennies. De nombreux citadins plébiscitent d’ailleurs ce retour de la nature en ville. Pour 9 français sur 10 avoir un contact avec le végétal serait effectivement un élément essentiel au quotidien.
Et pour cause, arbres et nature en ville possèdent un impact positif non négligeable sur le fonctionnement de nos écosystèmes urbains. Ceux-ci agissent directement ou indirectement sur des problématiques diverses telles que la qualité de l’eau, les eaux pluviales, la température, la qualité de l’air et contribuent de manière générale à améliorer nos espaces de vie (embellissement, décor, ombrage etc.). Une ville sans arbres serait effectivement bien triste !
Quand on considère ces nombreux avantages pour la société, il y a donc de solides arguments en faveur d’une augmentation des investissements pour la renaturation de nos espaces urbains et la plantation de nouveaux arbres. Aux Etat-Unis, une étude réalisée par le Service forestier américain et l’Université de Californie a par exemple révélé que pour chaque dollar dépensé en plantation d’arbres et entretien, ces derniers offraient un retour sur investissement jusqu’à 6 fois supérieur.
Un bénéfice quantifiable qui repose notamment sur le lien existant entre la présence d’arbres et la santé publique. Les arbres agissent, par exemple, significativement sur la réduction des concentrations en particules. Or ces pollutions atmosphériques sont les plus dommageables puisqu’elles seraient, selon l’OMS, responsables de la mort d’un peu plus de 3 millions de personnes par an.
Dans le Kentucky, une étude menée à Louisville a notamment permis de mettre en lumière ce lien étroit. A l’aide d’une barrière végétale constituée de 80 arbres matures et implantée à proximité d’une voie rapide, les chercheurs ont pu démontrer que le filtre végétal permettait de diminuer la pollution en particules fines de près de 60%. Le système immunitaire des 80 volontaires s’est également trouvé renforcé. Les coût de soin ont donc été indirectement diminués grâce à la plantation de cette barrière d’arbres expérimentale.
En France, une étude réalisée en 2016 pour le compte de l’UNEP concluait qu’augmenter le nombre d’espaces verts de 10 % dans les villes permettrait de réduire les dépenses de santé d’environ 94 millions d’euros, en diminuant notamment la prévalence de l’asthme et de l’hypertension. Selon les conclusions d’une autre étude « Planting Healthy Air » pour l’ONG Nature Conservancy : en investissant seulement 3,6 € par habitant dans la plantation d’arbres, les villes pourraient sauver entre 11 000 et 37 000 vies par an.
Les arbres ont également la possibilité de réguler la température de l’air. Lors de forts épisodes caniculaires, comme celui que nous avons pu vivre cet été, l’ombre produite par ces derniers devient un véritable enjeu de santé publique. En ombrageant notamment des surfaces imperméables qui rediffuseraient la chaleur et augmenterait ainsi la température de l’air, les arbres sont indispensables pour réduire les « îlots de chaleur » : ce phénomène qui se traduit par la persistance d’un dôme thermique, créant une sorte de microclimat urbain où les températures sont significativement plus élevées. Les arbres plantés en milieu urbain seraient ainsi capables d’abaisser la température de 2 à 4 degrés autour d’eux.
Enfin, ces végétaux participent également à la constitution d’espaces publics qualitatifs (Parcs notamment), or ceux-ci œuvrent indirectement sur la santé physique et le bien-être des habitants. En proposant des possibilités pour se dépenser, les parcs ont effectivement démontré tout leur intérêt pour luter contre l’obésité et améliorer la santé cardiovasculaire. Des études ont également permis de prouver l’impact de la végétation sur l’équilibre psychique des citadins. Comme les pelouses ou les fleurs, les arbres contribuent à diminuer le stress et l’agressivité et renforcent le sentiment de sécurité.
Partant de ce constat, il conviendrait d’explorer les moyens de renforcement du lien entre le secteur de la santé et les acteurs qui gravitent autour de la nature en Ville. La priorisation des investissements publics devrait logiquement se tourner vers ce qui semble optimal en matière de bénéfice social et médical pour les populations, Toutefois le chemin semble encore long… En 2017, nous évoquions dans nos colonnes l’outil Treepedia permettant de mesurer et de comparer la couverture végétale des Villes à travers le monde. On constate aisément que cette canopée urbaine est encore bien trop faible dans la plupart des grandes métropoles analysées.
D’ici 2050, l’ONU prévoit que plus des deux tiers de la population mondiale vivra en ville, la plantation d’arbres constitue donc une stratégie facilement exploitable pour nous aider à survivre en milieu urbain. La diversification des sources de financement en faveur de la nature urbaine – et l’utilisation d’arbres en tant que véritable investissement de santé publique, pourraient aider les grandes métropoles à renforcer leur résilience face au changement climatique, Une canopée urbaine en bonne santé sera, pour cela, un élément extrêmement déterminant.
Attention, toutefois, à ne pas tomber dans la « politique spectacle ». Lorsque l’Éthiopie fait le « buzz » en plantant des millions d’arbres en quelques heures ou lorsque Milan s’engage à planter 3 millions d’arbres d’ici 2030… Il faut bien évidement voir quel est le potentiel de survie de ces ces nombreux arbres et leur garantie d’arrivée à maturité. Puisque c’est à ce moment-là qu’ils demeurent réellement efficaces. De même, le choix des espèces est primordial, si les arbres rendent de nombreux services, ils peuvent aussi être contre-productifs. Certaines espèces peuvent en effet aggraver la pollution.
Ces investissements doivent donc être accompagnés par des ressources humaines et financières importantes. Ils ne doivent pas détourner l’attention de l’effort le plus important qui doit être consenti concernant la réduction des émissions de GES.
Enfin, pour conclure, peut-être est-il utile de préciser qu’outre les politiques publiques, nous pouvons tous intervenir dans la végétalisation de notre environnement. Ce développement prioritaire en matière de santé publique ne doit plus être l’apanage des seuls élus locaux. Nous avons effectivement tous la possibilité de participer au retour de la nature en ville.
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